Une légère brise faisait bruisser les feuillages épais de la forêt d’Émeraude. Dans quelques minutes, le soir allait tomber comme le froid qui accablait déjà les chairs de nos aventuriers. Au nombre de quatre, ils se connaissaient depuis un bon moment maintenant. Leurs différences avaient laissé la place à une grande amitié. Quant au respect mutuel, on le cherche encore parfois.
L’un d’entre eux, protégé d’une armure de plate aux reflets dorés, se nommait Théo de Silverberg. Paladin de l’inquisition, c’est un jeune homme brun et charismatique aux cheveux en batail avec un visage aux traits droits et durs. Sa confession à la lumière veut qu’il soit juste. Cela lui confère de prodigieux pouvoirs. Il tenait par la bride son destrier, Lumière, un magnifique cheval de guerre blanc chargé de matériel, et gardait une main sur le pommeau de son épée, rangée dans son fourreau, un bouclier de l’inquisition accroché sur le dos, prêt à toute éventualité.
Le paladin ralentit le pas avant de se retourner vers ses compagnons à l’approche d’une petite étendue d’herbe épargnée par les ronces, fougères et autres végétations présentent dans cette région :
— Nous devrions peut-être nous arrêter pour la nuit et dresser le campement tant qu’il y a encore un peu de lumière. Qu’en pensez-vous ?
Les compères se regardèrent un à un avant d’acquiescer. Théo débrida alors sa monture et se détacha du groupe pour aller chercher un peu plus de bois que les maigres ressources qu’ils possédaient.
Un grand homme vêtu d’une cape et de tissus bordeaux ornés de broderie s’approcha du cheval en s’appuyant sur son bâton pour en détacher le barda qu’il transportait et les tendre derrière lui :
— Plus bas Bob…, lui lança un nain.
— Oh excuses moi petit homme euh… je veux dire Grunlek, rétorqua l’homme à la parure avant de lui présenter les différentes affaires qu’il détachait.
Grunlek ne répondit rien, habitué aux brimades de son acolyte. Le nain, avait un mystérieux bras mécanique utile dans différentes tâches. Personnes ne savait comment il avait reçu ce bras mais l’on pouvait sentir une grande puissance en émaner. Spécialiste en art culinaire, il portait également une armure de cuir.
Alors que Bob, dit Balthazard Octavius Barnabé Lennon prenait les dernières bûches de bois des réserves pour allumer un feu, celui-ci se retourna vers le dernier des aventuriers qui avait entamé une ronde autour de l’étendue qui servirait de camp, armé de son arc finement sculpté:
— Rien à signaler Shin ?
— Pas pour le moment…t’en mieux, on pourra dormir tranquille.
Shin de son nom Shinddha Kory, est un être à l’apparence humaine qui se cache sous un capuchon sombre dont on peut seulement apercevoir de temps à autre des morceaux de peau bleutéé ou le reflet de ses yeux bleus cristallins. Cela explique peut-être ses affinités avec la nature, sont accoutrement le fait ressembler à un éclaireur.
L’archer, après avoir terminé son tour de garde, était revenu déplier les couches rudimentaires en toile de jute autour du futur foyer.
Quant à Bob, il a de grands pouvoirs liés au feu. C’était un homme de la ville qui fréquentait la noblesse et avait reçu une bonne instruction. Il avait un visage effilé et des cheveux longs, bruns et ondulants sur ses épaules. Son bâton possédait à son extrémité une pierre rougeoyante dans laquelle semblait danser une flamme. Le plus étrange chez lui, c’est que Théo garde constamment un œil sur lui mais le petit groupe savait très bien pourquoi.
Le mage se positionna devant le petit tas de bois qu’il avait constitué et se concentra quelques instants avant de faire jaillir une petite gerbe de flammes qui embrasèrent les brindilles sèches instantanément.
Peu de temps après que le campement ait été installé, les aventuriers entendirent la voix de Théo au loin :
— Hé tout le monde ! Venez m’aider !
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© Sorina-Chan 2015, Aventures |
Le paladin tenait dans ses bras une jeune femme au teint pâle et visiblement inconsciente. Shin accouru et l’aida à transporter l’inconnue sur la couche la plus proche. Leurs amis vinrent se regrouper autour du corps fébrile de la demoiselle et se regardèrent. Théo se lança :
— Je l’ai trouvée plus loin dans la forêt, elle délirait et s’est évanouie à mon arrivée.
— Elle a dû avoir peur de toi, lâcha Grunlek.
— C’est sérieux, repris le paladin sèchement, écoutez, je vais lui prodiguer mes soins et nous verrons comment évolue son état.
Á ces mots, tous s’écartèrent et Théo s’agenouilla. Ce dernier plaça ses mains au-dessus de la jeune femme et une lumière diffuse l’engloba de part en part. Cela fait, l’homme la veilla pendant que ses camarades discutaient en se reposant du chemin à prendre dès le lendemain.
Environ une heure était passée depuis que la jeune femme était arrivée et la nuit étendait maintenant ses rideaux infiniment étoilé à travers le ciel. Shin avait repris ses rondes depuis peu tandis que Grunlek faisait l’inventaire de la nourriture qui leur restait et que Bob jouait avec les flammes du petit feu qu’il alimentait au besoin. Théo n’avait pas bougé, il n’avait observé aucune amélioration dans l’état de la fille fiévreuse étendue sur la toile. L’inquisiteur lança d’un air hautain :
— Visiblement mes pouvoirs de paladin, pourtant au-delà de vos compétences, ne marchent pas. Je ne sais quel mal ronge cette jeune femme…
— Ben ça, quand tu dois soigner une hémorragie ça va tout seul mais à partir du moment où on attrape un petit rhume c’est fini, rit Bob
— C’était juste pour me la péter, c’est bon…
— Je sais bien, ponctua Bob d’une tape dans le dos de Théo
Le mage se leva et vint à côté de son interlocuteur pour observer la jeune femme :
— Je pense que la première chose à faire est de savoir qui est-ce ou au moins d’où vient-elle.
— Je vais retourner voir dans la forêt, là où je l’ai trouvée, pour voir si je peux obtenir des réponses.
Shin s’affairait déjà à examiner les quelques affaires de la demoiselle tandis que Théo s’éloignait vers le nord. Au moment où celui-ci allait quitter la lueur du campement, il s’interrompit :
— Grunlek, tu veux venir ?
— Non, répondit le nain depuis le campement, je comptais lui préparer une tisane pour la soulager. Pourquoi ? Tu as peur du noir ?, blagua-t-il.
Le nain reçut en guise de réponse une illumination de la nature entourant Théo qui faisait briller son armure.
Au fur et à mesure que cette luminescence s’était atténuée dans l’obscurité, Bob en avait profité pour commencer à ausculter l’inconnue tremblante de fièvre dans la froideur de la nuit. Alors qu’il palpait la jeune femme aux oreilles en pointes et aux cheveux argentés, une certaine fragrance naturelle lui parvint :
— Á la voir, c’est surement une elfe ou une druidesse de cette forêt, marmonna-t-il.
— Sûrement. Regarde ce que j’ai trouvé, dit Shin en montrant une épée courte.
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L’arme était bosselée à certains endroits, elle semblait faite d’un bloc, elle n’était décorée que par de petits écriteaux échappant au langage de Shin. Alors qu’il tenait l’épée, la jeune fille se retourna et mis la main sur celle de Shin. L’archer déposa l’arme et lui tint pour la réconforter. Peu après, Grunlek se présenta avec un godet métallique rempli de tisane de sa confection. Bob et Shin assirent l’elfe et la firent boire. Quelques instants plus tard, elle semblait mieux, apaisée, pour le moment.
Les aventuriers méditèrent dans les crépitements du feu avant d’apercevoir la lueur et le fracas de l’armure de Théo à travers la pénombre épaisse des fourrés :
— Me voilà, j’ai trouvé des éléments intéressants dans la forêt, dit Théo en posant des morceaux de papiers sur une des couches
— Des bouts de parchemins ? Qu’est-ce qu’ils disent ?, demanda Grunlek, intrigué.
— Je n’en sais rien, je ne sais pas déchiffrer ce que ça veut dire…, répondit-il en tendant les morceaux à Bob.
Le pyromage se leva pour inspecter les bouts de parchemin mais au moment où il allait en saisir un, ce dernier vit le visage de Théo devenir blême, encore plus que d’habitude, le paladin le regarda avec de grands yeux, se mit à hurler de tous ses poumons d’une voix efféminée et commença à tournoyer sur lui-même pour tenter d’arracher ce que ses amis pouvaient identifier comme étant une énorme araignée noire et velue qui avait planté ses pattes et ses crocs entre l’armure du paladin. Les aventuriers étaient stupéfaits, il leur fallut quelques secondes pour réaliser :
— Crame moi ça espèce de trou du cul !, hurla Théo dans la panique.
— Tu es fou, je vais te tuer !, repris Bob consterné.
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